dimanche 2 mai 2010

Hambre.


Je n'aurai plus jamais faim, me suis-je dit. Il était huit heures du soir et j'avais faim. J'ai 20 ans, et fini de grandir. On mange pour grandir. Je ne grandirai plus, me suis-je dit. Je ne mangerai plus que le minimum. Ce qu'il faut pour durer. Cela fait comme un champ d'exploration immense, la découverte d'un territoire sauvage et secret.

Je vis avec la faim, je la mate, je la dompte, je l'apprivoise, je l'endors. Après avoir été cruelle, elle se calme toute seule, il suffit d'attendre. Je sais qu'un bonbon la trompe. J'aime la sentir toute la journée, juste en dessous du plexus, un courant d'air qui me réunit à l'air du ciel. Je concidère que la faim me donne une énergie immense, une légèreté de sarcasme. Mes pieds ont moins à porter, et même si [le monde me dit que dans quelque temps on ne me vera plus, ou que je n'ais plus de seins et que les gars aiment les formes], je suis fière de mon entreprise. J'allège le monde.

Rompre le cycle de la douleur, de l'avidité, des déchets, du trop. Si je mange rien, rien ne me mangera.

Je sèche les repas, j'échappe aux chaînes alimentaires, à toutes les chaînes. Je m'ennivre de faim, je m'exalte de théories immenses, dont j'attrape des bouts qui m'arrangent.

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